Je ne suis pas du genre à compter les années. Je n'ai pas vraiment de problèmes avec mon age et je n'ai pas fait ni de crise de la trentaine ou de la quarantaine. J'ai toujours vécu de la même façon, depuis que je suis jeune. J'étais peut-être un quarantenaire précoce à mes vingt ans. Mais je vois quand même une différence. Une différence notable. Qui est encore plus visible ce matin quand je vois l'état de mon fils par rapport au mien. Quand on vieilli, on récupère beaucoup moins bien. Je suis là, dans la cuisine comme un zombie en train de me préparer un smoothie, mon fils lui est en train de préparer son petit déjeuner. Hier soir, je suis sortie avec une jeune femme, et j'ai pris un malin plaisir à la suivre dans ses sorties nocturne. La demoiselle devait être à peine plus âgée que mon fils. De quatre ou cinq ans tout au plus. J'ai donc pas mal bu et passé une agréable soirée. Je pensais même pouvoir conclure et ramener la jeune femme dans mes draps pour la nuit. Mais non. Il a fallut que ça arrive. Au milieu de la nuit, alors que je commençais à être sérieusement éméché, je suis tombé sur un visage connu dans ce haut lieu de la jeunesse. Mon fils. Oui je suis tomber sur mon fils en boite au milieu de la nuit. Je vous assure que d'un seul coup, je me suis senti tout sauf à ma place. Ce n'est pourtant pas mon genre de me laisser démonter. Mais là, j'ai eu une vraiment sale impression. J'ai quitté la boite pratiquement tout de suite en plantant ma compagnie. Je n'ai aucune idée de si Luka m'a vu. J'espère que non.

Le réveil est dur et j'avoue que voir mon fils encore chez moi me fait poser des questions. Pas que je ne suis pas heureux de le voir, mais c'est qu'il est sensé vivre chez sa mère. Bon même si on habite assez prêt l'un de l'autre (la maison de sa mère étant seulement à une dizaine de rues d'ici) et ma maison étant bien plus grande que celle de sa mère, je sais qu'il s'est toujours refusé à vivre avec moi. Je fronce les sourcils en le regardant. Mon smoothie est prêt. Ne prend même pas la peine de le verser dans un grand verre, je bois directement dans le contenant du mixeur. « Luka dit moi. Il se passe un truc avec ta mère ? Depuis le début de l'année t'es pratiquement ici tout les soirs. » Une nouvelle gorgée. Il me regarde. Putain, je n'ai jamais su parler à ce gamin. Je me dépêche d'avaler ma gorgée pour éviter qu'il me balance une réplique cinglante dont il a le secret. Putain, je lui ai même pas dit bonjour encore. « Je veux dire … Je suis content que tu sois là, mais … enfin … Bon tu me comprends quoi. » Putain, je suis vraiment nul pour parler avec lui.

J'ai eu mon fils très jeune. Il n'était pas spécialement désiré et je pense qu'il l'a très vite compris en grandissant. Sa mère et moi avons toujours préféré notre carrière à notre vie de famille. Un choix de vie. Je n'avais pas envie de me priver d'un bel avenir en sacrifiant tout mon temps pour lui. J'ai juste dès ses huit ans, installé une tradition entre nous. Deux semaines de voyage au travers le monde pour qu'on ai de bons souvenirs en commun. Étrangement à chaque fois que l'ont part, tout s'arrange entre lui et moi. On est proche, on arrive à discuter et on retrouve l’intérêt de partager des choses. Mais ici. Quand on est à la maison, j'ai l'impression d'être un étranger pour lui. Bon après, je sais que je ne suis pas un super père non plus. Mais je tente de faire des efforts. Mais rien n'y fais. On arrive pas à communiquer sans se prendre le chou. Je fais avec.