FRANCISCO & TILDE
see that face again

Ses mains étaient affreusement moites. Sa respiration courte. Son cœur serré dans sa poitrine, n'avait jamais battu aussi vite. Cinq minutes déjà qu'elle était plantée sur le pas de la porte. Cinq minutes que Tilde essayait de trouver le courage d'annoncer sa présence à l'homme qui avait partagé sa vie pendant des années. Une porte, c'est tout ce qui la séparait de lui et de sa fille. De son foyer.  Une année qu'elle n'avait pas été aussi proche d'eux. Une année qu'elle cherchait à fuir inlassablement Vérone, quitte à passer pour une femme horrible et une mère détestable. C'était sans doute ce qu'elle était au fond, ou en tout cas, c'était comme ça qu'elle se voyait. Le temps avait fait son travail et peut-être la danoise n'était-elle plus aussi pitoyable que lorsqu'elle avait décidé de tout plaquer mais, elle restait une ruine, une femme détruite par les souffrances que la vie lui avait infligé et, par ses propres décisions. Et pourtant, elle se tenait là, debout face à cette bâtisse qui lui rappelait tant de souvenirs doux-amers. Une dernière inspiration. Elle gonfla ses poumons d'air, bien consciente qu'elle risquait d'en manquer lorsqu'elle apercevrait son visage, et le reste de son corps de courage. Son poings se serra pour venir frapper plusieurs coups secs contre la porte Quelques secondes plus tard, c'est son impatiente qui la poussait à venir appuyer sur la sonnette. Elle n'avait rien préparé, pas un discours, pas un mot. Une part de son être espérait que les années qu'ils avaient passé ensemble suffiraient à créer un climat de confiance ou au moins l'ombre d'un chemin plus paisible pour faciliter la discussion. Une clé tourna dans la serrure et immédiatement, le peu de confiance dont elle avait fait preuve jusque là s'évapora. Francisco n'allait pas l'accueillir les bras ouverts. Pas après tout ce qu'elle avait fait. Quant à Adele ? Si elle était encore trop jeune pour comprendre tout ce qui avait pu se passer, elle avait du ressentir cette absence. Et si, du haut de ses trois ans, elle lui en voulait elle aussi ? Sa gorge se noua. Ses doigts se serrèrent autour de cette ourson en peluche qu'elle tenait dans ses mains depuis qu'elle avait quitté la chambre d'hôtel dans laquelle elle s'était installée après son retour à Vérone. La porte s'ouvrit, laissant apparaître ce visage dont elle connaissait encore chacuns des traits. Elle les connaissait si bien qu'elle aurait été capable de les dessiner les yeux fermés. Son regard se fixa quelques secondes sur lui avant de se baisser instinctivement, déjà accablé par la honte  et la haine qu'elle sentait chez Francisco. Tilde ne pouvait plus faire marche arrière. Pas après avoir fait l'effort de venir jusqu'ici. Et puis, l'italien n'était pas bête ; il devait avoir déjà compris que si elle se montrait aujourd'hui, c'était parce qu'elle avait l'attention de reprendre sa place, du moins, sa place auprès d'Adele. Et si elle partait maintenant, sans lui dire un mot ? Peut-être que lui s'en complairait, mais elle non. « Hey.. » Stupide. Elle était stupide et ridicule. Quelques secondes passèrent, peut-être même une minute. « Je suis venue voir Adele » Lâcha la brune avec un sang froid qui la surpris. Au fond, elle était venue le voir lui aussi, pour savoir ce qu'il était devenu, pour voir si la tragédie l'avait abimé tout autant qu'elle, mais sa fille.. Sa fille était sa motivation principale et dorénavant, elle serait le centre de son existence.

FRANCISCO & TILDE
see that face again

Les conte de fées n'existent pas. Les fins heureuses suivant les plus grands drames, non plus. Tilde n'y a jamais vraiment cru, protéger par des parents qui lui ont très rapidement fait comprendre que la vie n'est pas un parcours facile. Son cœur ne s'était donc nourris d'une quelconque once d'espoir avant cette visite à son ex-mari. Francisco ne lui devait rien. Francisco avait tout les droits de la haïr, de lui cracher au visages, de l'insulter, de l'accabler de tous ses maux, de l'écraser. Tilde avait été faible, lâche et elle avait fuis pour sauver sa peau. Une soudaine envie de liberté qui l'avait emporté sur tout le reste alors que la brune ne se sentait plus capable d'être une mère ou une bonne épouse. Ces mêmes pensées ne l'avaient pas quitter aujourd'hui. Cette année de césure passée le plus loin possible de Vérone n'avait pas été aussi salvatrice qu'elle l'avait espéré. Malgré tout, Tilde se tenait maintenant devant cette porte, déterminée à retrouver une place dans la vie de sa fille et pourtant totalement apeurée à l'idée de ne pas savoir s'y prendre. Cette petite brune, mélange parfait d'un père et d'une mère qui s'étaient aimés passionnément lui avait terriblement manqué. C'était une part d'elle-même que la brune avait laissé derrière elle en décidant de fuir. La meilleure part de son être. Et elle espérait sincèrement que Francisco pourrait le comprendre. Elle avait fait un tas d'erreurs avec lui, des erreurs qu'elle regrettait. Elle l'avait quitté, submergée par la douleur et sans de réelles explications. Ce venin qu'il lui crachait maintenant au visage ne l'étonnait donc pas une seule seconde. Elle crut pouvoir soutenir son regard mais les premiers mots de son ex-mari lui firent rapidement baisser la tête. Il se trompait. Tout ce qui s'était passé était bien plus compliqué. Ce qui l'avait poussé à partir ce n'était pas la vie de famille mais son incapacité à rendre heureuse la sienne. « Non » Non, elle ne partirait pas. Et comme pour lui faire comprendre sa détermination la brune vint poser la paume de sa main contre la porte. Prévoyante, elle s'attendait presque à ce qu'il lui claque la porte au nez. « C'est ma fille Francisco, tu ne peux pas m'empêcher de la voir » Après tout ce qu'elle avait fait il en avait sûrement le droit mais elle espérait être capable de toucher le bon sens de cet homme qu'elle avait longtemps fréquenter. « S'il te plait.. J'ai besoin de la voir » Besoin était le mot juste. Elle lui avait manqué, lui manquait toujours horriblement et le simple fait de savoir que sa petite fille se trouvait sans doute à quelques mètres seulement, provoquait chez Tilde tout un tas de sensations qu'elle n'avait plus ressentis depuis bien trop longtemps. « Laisse moi une chance... » Une chance de retrouver sa place auprès d'Adele et peut-être aussi, une chance de se rattraper auprès de cet homme formidable qu'elle avait lâchement abandonné.

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