Tu y as beaucoup pensé. Depuis qu’il t’a donné ce rendez-vous, tu n’as fait que ça en fait… Penser à lui. T’imaginer de quoi il allait te parler, s’il allait encore te faire la misère ou s’il était sincère. Oui, tu y as beaucoup pensé et aucun de tes raisonnements ne t’a rassuré. Ça ne laisse présager rien de bon. Ce mec est forcément un barje pour t’avoir jeté comme une vieille chaussette pour ensuite t’inviter à diner. Il doit avoir quelque chose derrière la tête. Tu as beau être naïve, tu te doutes bien qu’il y a de fortes chances pour que ce diner se passe mal. Ce serait logique après votre première rencontre. Mais t’es prête à le faire. Pour ta carrière. Rien que pour ça, évidemment. Pas pour ses beaux yeux… Même si tu y es sensible. Clairement. Que tu te l’avoues ou pas d’ailleurs. Tu aurais trouvé une autre solution pour te faire pardonner s’il n’avait pas été à ton goût. Quelque chose t’attire, te plait. Ce n’est pas que physique. Tu as envie d’en voir plus, d’en savoir plus. C’est dangereux ces petits jeux-là. Tu ne le sais pas encore d’ailleurs mais Leandro est dangereux. C’est exactement le genre de types que tu ne devrais pas fréquenter. Et pourtant, t’es devant chez toi, avec ta plus belle robe et t’attends. Tu l’attends, lui, ce mec que tu méprises mais avec qui tu vas tout de même passer la soirée. A bien y réfléchir, tu dois être un peu masochiste sur les bords. La limousine arrive à huit heures piles. Il n’a pas menti, il a vraiment sorti le grand jeu. Toi qui pensais qu’il se foutait de ta gueule. Tu ressens un petit pincement au cœur quand tu te demandes s’il t’attend à l’intérieur. Tu as envie de te dégonfler. Tu ne peux pas. Il va te manger toute crue. « Mademoiselle Mastroianni ? » Tu secoues la tête, incapable de dire un mot. On t’ouvre la porte de la limousine. Tu hésites. Finalement, tu passes d’abord la tête et quand tu vois que Leandro n’y est pas, tu t’y installes. Ouf. Le moment gênant des retrouvailles est repoussé d’encore quelques minutes. Sur le trajet, tu sens ton palpitant s’emballer. Ce n’est pas possible… A ce rythme-là, tu vas t’évanouir avant même de pouvoir boire l’apéritif. Tu tiens bon. Il le faut. Pour le bien de ta carrière. Il l’a promis. Après ce diner, il arrêtera de nuire à ta carrière. Tu as sous-estimé le pouvoir de ce mec, tu n’as pas compris pourquoi tout le monde autour de lui semblait en avoir peur. Tu comprends un peu mieux maintenant. Il n’empêche que tu as envie de lui sauter à la gorge pour t’avoir fait rater toutes ces belles opportunités. Ce n’est pas juste. D’accord, tu lui as fait comprendre que tu étais en colère… Mais ça ne justifie pas de te blacklisté partout. C’est immoral. Leandro Masseria est-il seulement moral ? Tu en doutes. La limousine s’arrête, la pression monte. Le chauffeur t’accompagne jusqu’à la porte du restaurant où tu fais ton entrée seule. Tout de suite, tu te sens mal à l’aise. Comme au casting. Tu sens son regard sur toi et sans l’avoir trouvé parmi les tables du restaurant, tu sais qu’il est là et qu’il t’observe. Et effectivement, tes yeux finissent par trouver les siens qui sont en train de te transpercer de part en part. Cette fois, tu ne te figes pas. Tu avances courageusement pour venir t’installer en face de lui. « Bonsoir. » que tu lui lances en te demandant si c’est bien la peine de faire de la politesse. Tu ne sais d’ailleurs absolument pas quoi lui dire, tu te contentes donc de ça. Ça suffira pour le moment. Tu es là, c’est déjà bien.