Quel est votre meilleur souvenir ? J'ai sept, onze ou quinze ans. Je rentre de l'école, sac à dos négligemment accoté sur l'épaule droite. Sur les marches du vieil immeuble où j'ai grandi, les parfums dansent. Le thym et le basilic chatouillent mes narines, la sauce tomate, cuisson lente - très lente, embaume mon cœur comme autant de paroles tendres. Quand je passe le pas de la porte, les grains de café fraîchement moulus, l'âpreté doucereuse qui s'attarde sur ma langue et mon palais. Les trois femmes de ma vie sont là, s'affairent dans la petite cuisine. Ma tante soulève le couvercle d'une casserole, vapeur ondoyante caresse le bout de mon nez. Mamma ébouriffe mes cheveux en m'envoyant faire mes devoirs, alors que ma grand-mère m'embrasse rapidement sur la joue en me demandant si j'ai faim.

Votre plus grand rêve ? Des enfants, tout un tas. Un chien et une jolie maison. Des dimanches hivernaux et froids passés entre les draps avec la femme qui m'aura choisi. Et alors qu'on se murmurerait quelque secret au creux de l'oreille, après des baisers tièdes glissés dans la nuque, les gamins débouleraient en trombe dans la chambre, sauteraient sur le lit en réclamant leur petit-déjeuner, éclats de rire chantant à mes oreilles. Ouais, des enfants. Toute une équipe de football.

Avez-vous des peurs ou des phobies ? Rien d'apparent, pas de vertige ni d'arachnophobie. Peut-être simplement la solitude, bien qu'elle m'apaise parfois. Je crains de finir seul, de ne pas parvenir à briser cette malédiction qui s'abat sur ma famille. D'être passé à côté de ma chance.

Êtes-vous plutôt sportif ? Je l'ai toujours été. J'ai pratiqué le football dans un club de la ville pendant mon enfance, comme à peu près tous les gamins de mon âge, et puis j'ai compris que je préférais les sports individuels quand je me suis inscrit à mon premier cours de boxe il y a presque vingt ans. Aussi, je cours tous les matins flanqué de mon fidèle compagnon, un Saarlos nommé Allegro.

Quel événement de votre vie vous a le plus marqué ? Mon mariage. Mes mariages ? Le premier reste marqué au stylo indélébile dans un coin de mon cœur. La femme que j'aime profondément fait son entrée dans l'église, je sens le regard de mes proches s'attarder sur mon visage, me sonder. J'en ai le souffle coupé tant elle est belle. Elle irradie, et les larmes me montent aux yeux.

Pourquoi avez-vous choisi la profession que vous exercez actuellement ? L'écriture s'est imposée naturellement. J'ai d'abord retranscrit les histoires que me contait Nonna. Tous les soirs avant de m'endormir, je griffonnais dans un vieux cahier que je dissimulais sous mon matelas. Puis, ce sont rapidement mes histoires bien à moi, celles qui se tissaient promptement dans les recoins de mon esprit, que je couchais sur papier. Après le lycée, j'ai commencé des études en lettres classiques, mais je ne les ai jamais terminées. Je me suis plutôt consacré à ma passion en trainant de petit boulot en petit boulot ; j'ai été serveur, promeneur de chiens, j'ai travaillé dans un fast-food et j'ai également été ce mec qui vous suit dans le centre-commercial en essayant de vous asperger de parfum. A vingt-cinq ans finalement, mon premier roman a rencontré un succès immédiat et auquel je ne m'attendais pas. Fort de mes quatre ouvrages, je m'autorise désormais une pause et me consacre à mon nouveau projet : un bar à vins que j'ai inauguré tout récemment.

Et si vous étiez un animal ? Un ours. L'on dit que j'en ai déjà les grognements rauques.

Depuis quand êtes-vous à Vérone ? J'y suis né, j'y ai grandi et je ne l'ai jamais quittée. Mes racines sont ancrés dans la ville et, malgré de nombreux voyages promotionnels pour mes romans, elle m'a toujours rappelé à elle.

Quel est, selon vous, votre plus grande qualité ? Mon audace, peut-être. Je ne crains pas les échecs, aussi n'ai-je pas peur de me lancer de nouveaux défis. Les opportunités, je les crée. J'ai passé la plus grande partie de ma vie de jeune adulte à frapper aux portes des maisons d'édition de tout le pays. Combien ont claqué la porte ? Beaucoup. Beaucoup trop. Pourtant, je n'ai pas baissé les bras, et mon acharnement a payé.

Et votre pire défaut ? Mon impulsivité, mon instinct qui me dicte toutes mes actions. Je ne réfléchis que très rarement avant d'agir, souvent à mon plus grand désavantage. Je grogne, hausse le ton de la voix, mes poings serrés s'écrasent violemment, je ris fort, et je tombe éperdument amoureux en un regard. Ma vie entière est dictée par les sentiments exacerbés qui dansent en moi.

Que pensez-vous de votre famille ? J'ai grandi dans un environnement purement féminin. Les trois femmes de ma vie, je les appelle. Ma grand-mère et ma tante sont devenues veuves très tôt, avant même ma naissance, et ne se sont jamais remariées. Ma mère est tombée enceinte d'un homme qu'elle connaissait à peine, elle n'avait que seize ou dix-sept ans, et je n'ai jamais posé les yeux sur le visage de celui que j'aurais dû appeler papa. Elles m'ont élevé toutes les trois, ensemble, une armée de petites femmes fortes et indépendantes. J'ai été couvé, protégé, adoré. D'elles ne me reste plus que ma tante, Zia, qui m'invite tous les dimanches à sa table et qui se désespère de faire la connaissance, un jour, de son petit-neveu.

Que pensez-vous des rencontres sur internet ? Je suis sceptique et curieux à la fois. Peut-être est-ce là la solution à tous mes maux, apprendre à connaître quelqu'un avant de s'emballer, s'intéresser sincèrement à son interlocutrice sans tomber sous le charme d'un regard en coin ou d'un sourire taquin.

Et sinon, les réseaux sociaux, ça vous branche ? Pas vraiment, bien qu'il ait fallu que je m'y mette, sous les ordres de mon éditeur et de mon attaché de presse. Je suis le tout de très loin néanmoins, la technologie avançant beaucoup trop rapidement à mon goût.

Que regardez-vous en premier chez une femme ? Ses mains, ses doigts, sa gestuelle pendant qu'elle parle. Sa démarche et sa façon de se tenir. Je suis extrêmement sensible au regard également. Ne dit-on pas que les yeux sont la fenêtre de l'âme ? Et puis, pour être tout à fait franc, je ne demeure jamais de marbre face à une belle chute de reins.

Quel est votre premier rendez-vous idéal ? Un rendez-vous sur la plage, une soirée dans un restaurant gastronomique, une ballade dans un parc, je n'ai pas d'idée préconçue et le plus simple des rendez-vous peut se transformer en rendez-vous idéal si je me sens bien, détendu et que l'atmosphère est agréable. C'est une histoire de rencontre entre deux êtres, un feeling, plus qu'un lieu.

Je n'attends rien de /LOVE sinon des rencontres, des surprises, des éclats de rire. Je ne sais plus si je crois encore en l'être idéal, l'âme sœur, cette seconde moitié que l'on est censé reconnaître et qui comblera le vide. C'est une vision simpliste et qui m'effraie : n'avoir droit qu'à une seule belle aventure, un seul véritable amour. Et si je l'avais déjà perdu ? Quoi qu'il en soit, je ne suis jamais réfractaire à de nouvelles rencontres, à des discussions animées ou un peu plus posées. Et on ne sait jamais ? Peut-être que j'écrirai encore une belle histoire, à quatre mains cette fois.